Tous les articles par Daniel Fortis

On ne peut pas bâtir son bonheur sur le malheur des autres

Sous le titre «  On ne fait pas son bonheur sur le malheur des autres «  votre journal a publié une interview de Metin Arditi ( TdG du 20.10.23 ) . Cette personnalité de confession juive nous a donné une leçon de lucidité et d’ouverture exceptionnelle. Tout en restant solidaire de ses coreligionnaires, il ne cède pas face à la rage et à la spirale infernale et sans issue de la vengeance sans limite. Il appelle à une introspection et à une analyse sur les causes de ce déchainement de haine et d’atrocités du 7 octobre 2023. Cette démarche  a suscité un tollé parmi une majorité des courriers des lecteurs publiés ces derniers jours. Sensibilisés par des images d’une extrême violence fournies exclusivement par les autorités israéliennes, les auteurs de ces articles n’appellent qu’à une destruction du Hamas qui implique de facto la destruction de Gaza et un nombre incalculables de morts civils. Monsieur Arditi préfère une prospective de paix en mettant à plat et objectivement une situation de guerre qui dure depuis 75 ans. Il fait honneur à sa communauté en considérant tous les aspects de cet engrenage dans lequel sont inclus l’injustice, l’humiliation et l’oppression faites aux Palestiniens. Au risque d’être cloué au pilori par les siens, il  refuse l’instrumentalisation des textes bibliques et préconise une recherche de la paix à travers le dialogue et la cohabitation équilibrée de deux Etats souverains.

Daniel Fortis                                                                                          Genève, le 25 octobre 2023

La guerre des images

La lettre du jour de votre dernier courrier des lecteurs (TdG 27.10.23) est une interminable litanie des pires exactions attribuées au Hamas le 7 octobre. Les descriptions abominables avec des détails sordides déclenchent un choc émotionnel qui court-circuite toute réflexion et toute analyse. Sans remettre en cause la réalité du pogrom commis par le Hamas, ces crimes suscitent néanmoins des interrogations. L’auteur de la lettre a-t-il , lui-même, visionné les vidéos ou rapporte-t-il des commentaires de source essentiellement israélienne ?  Pourquoi des journalistes indépendants ont-ils  été empêchés de se rendre librement sur les lieux des massacres ?  La guerre des images et des témoignages  polluent nos écrans dans le but de gagner la guerre des opinions publiques. Le Hamas, lui aussi, utilise des images atroces d’un prétendu bombardement sur un hôpital pour déclencher des manifestations dans le monde entier. Il ne faut pas tomber dans les erreurs et les dissimulations post-11 septembre de l’administration américaine. Celle-ci  a entrainé le monde entier dans une guerre antiterroriste avec des mensonges et des slogans primaires tels que « Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous ». Dans le conflit actuel, les faucons israéliens déclarent » si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes un antisémite ». Le Hamas, quant à lui,  déclare «  Si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes complices d’un génocide ». Il faut résister à ce piège binaire et prendre des distances avec les articles et les images intentionnellement insupportables qui servent à radicaliser et à manipuler. L’outrance de cette guerre de l’image est un poison qui ancre les esprits dans la haine de l’Autre et rend impossible toutes perspectives d’apaisement.

Daniel Fortis

1231 Conches                                                                                            Genève, le 29 octobre 2023  

GAZA, SORTIR DE LA SPIRALE INFERNALE

La photo aérienne de Gaza (ci-jointe) parle d’elle-même. Le contraste entre la densification extrême du territoire palestinien et les plaines cultivées des zones israéliennes est saisissant. Dans le monde, Gaza est le seul pays d’une telle densité. Deux millions et trois cent mille habitants vivent sur un minuscule territoire de 365 km2. Aucune zone agricole. Aucun aéroport. Aucune gare. Aucun port et, en plus, une interdiction de pêche au-delà de 10 kilomètres. Aucune université. Aucune industrie. La moitié de la population sans travail et sans avenir. Une dépendance totale à l’eau et à l’électricité. Deux uniques postes de frontière gérés au bon vouloir des deux voisins pour rentrer ou sortir d’un pays entouré de barbelés. Qui peut prétendre que Gaza n’est pas une prison ?

Aucun pays au monde ne subit de conditions de vie aussi avilissantes. Comment la communauté internationale et, en particulier, les pays occidentaux (qui se targuent de défendre les droits humains) peuvent-ils tolérer cette situation inhumaine ? La souffrance, la désespérance et l’humiliation ne peuvent qu’engendrer la haine et la barbarie.

Cependant les atrocités du conflit actuel peuvent servir d’électrochoc. Non pas pour assouvir une vengeance aveugle et sans limite (quoique compréhensible) mais pour sortir de la spirale infernale dans laquelle les dirigeants des deux pays ont entrainé leur peuple depuis des décennies. Après la colère, les deux peuples doivent sanctionner et renvoyer leurs faiseurs de guerres et élire des personnes de paix. Une image peut les inspirer. Celle de la  poignée de main en 1993 entre deux, jusqu’alors, ennemis jurés, Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, scellant les Accords d’Oslo. Des extrémistes les ont lâchement assassinés pour leur faire payer leur courageuse initiative de paix et tuer l’espoir d’une cohabitation entre deux Etats souverains.

Daniel Fortis

1231 Conches                                                                                         Genève, le 13 octobre 2023

Les carottes de la Butte de l’Observatoire

Nous avons appris la nouvelle reculade du Conseil Administratif de la Ville de Genève dans la saga du musée d’Art et Histoire (TdG du 28 juin). Pourtant, le 4 mai 2022, après six ans de gestion chaotique du dossier, le Conseil Administratif avait enfin défini le cadre du concours d’architecture en intégrant la Butte de l’Observatoire. Il a suffi de l’opposition d’un conseiller administratif pour invalider la décision avec une argumentation écolo-dogmatique de défense des arbres sans considérer le contexte du lieu. Jusqu’en 1957, un observatoire occupait le centre de la Butte. Sa démolition a laissé sur place des matériaux impropres à toute arborisation. Une grande partie des sous-sols de la Butte est actuellement occupé par des locaux de services publics. Sous-utilisés, ceux-ci ne pourraient -ils pas être réaffectés au musée ? Pour la petite zone arborisée, il est facile de définir un périmètre de protection. Ignorant ce contexte, La Ville de Genève atermoie depuis des décennies sous la pression d’ayatollahs écologistes. Dans leur obsession, ceux-ci utilisent actuellement la butte pour implanter un jardin potager didactique destiné aux citoyens qui croient que les carottes poussent sur les arbres. Ils pensent sauver la planète en permettant aux enfants des écoles avoisinantes d’observer, de loin et les pieds au sec, la croissance des carottes. Ne serait-il pas plus profitable de les amener dans une ferme pour leur faire découvrir la réalité paysanne en extrayant de terre les carottes de leurs propres mains. L’écologie de pacotille de nos édiles obstrue toute initiative et condamne toute ambition dans l’élaboration d’un beau projet contribuant au rayonnement de Genève et au service des Genevois. N’est-il pas temps que les instances cantonales dessaisissent la Commune de ce dossier ?

Daniel Fortis

Architecte et ingénieur EPFZ-SIA

1231 Conches                                                                                   Genève, le 2 juillet 2023

La phobie de l’amiante

Si la législation générale sur l’amiante est justifiée, les règlements d’application relèvent du délire sécuritaire. La multitude des mesures à prendre équivaut à écraser un moustique avec une massue. A part les grands travaux de démolition, la plupart des travaux de rénovation d’appartement, comme par exemple l’enlèvement de carrelage,  présente des risques dérisoires et devrait relever d’un traitement de bon sens (dépose précautionneuse, port d’un masque et humidification préalable des matériaux et des supports). A la place, un diktat sécuritaire est mis en place par une pléthore d’intervenants (ingénieurs- diagnosticiens, techniciens, laboratoires spécialisés, entreprises spécialisées et enfin de mystérieuses décharges spécialisées). Ces nouveaux métiers forment un cartel de l’amiante aux profits confortables. Il en résulte un ralentissement et un renchérissement absurde des travaux.

Cette phobie de l’amiante se nourrit des images des années 1950 avec des ouvriers qui scient et découpent sans masque des plaques d’amiante durant toute la journée dans un nuage d’amiante. Leurs conditions de travail étaient scandaleuses et leur exposition aux fibres leur a couté la santé et la vie. Aujourd’hui, quelle est la relation avec la dépose de quelques carreaux présentant un risque infinitésimal qui peut être maîtrisé par des mesures simples ? L’obligation du port d’un scaphandre dans ces conditions est ridicule.

Cette obsession de la sécurité devient indécente lorsque nous voyons les images du récent séisme en Turquie. Dans un nuage de poussière, très certainement plein d’amiante, des sauveteurs fouillent à main nue, sans aucune protection, les décombres des immeubles à la recherche de survivants. Cette vision dramatique devrait  nous interpeller et nous faire prendre conscience de notre hystérie sécuritaire suisse.

Daniel Fortis

Ingénieur civil EPFZ-SIA

1231 Conches                                                                         Genève, le 7 mars 2023

Une hystérie militariste

Alain Berset a osé le mot : Frénésie guerrière. Après le tôlé suscité en Europe, le rétropédalage de notre président n’ôte rien à la pertinence du propos que partage une majorité silencieuse. Depuis le conflit russo-ukrainien, le monde entier est entré dans une spirale d’hystérie militariste. Tous  les pays ont augmenté leurs budgets militaires. Les industries d’armement débordent de commandes. Des pays neutres rejoignent l’Otan. Les Etats-Unis créent une nouvelle coalition militaire antichinoise  dans le Pacifique. L’Ukraine reçoit toujours plus d’armes et de munitions pour écraser la Russie. La neutralité suisse devient un crime. Cette fuite en avant belliciste est irresponsable et sans issue.

Embourbée dans les plaines du Donbass, l’armée russe n’est plus qu’un tigre de papier. Pourtant, les gouvernements occidentaux continuent à brandir  la menace expansionniste de la Russie vers l’Europe ! On perd la raison et on oublie  que c’est l’Otan qui est responsable depuis la chute du mur de Berlin en 1989 d’un expansionnisme effréné. L’Union soviétique avait pourtant retiré  pacifiquement toutes ses troupes des pays de l’Est. Cette main tendue a été ignorée et  les Etats-Unis ,opposés au rapprochement de la Russie et de l’Europe, ont installé sans tarder des bases de l’Otan  dans ces pays et dans les ex-républiques soviétiques à qui la Russie avait accordé  l’indépendance. Cela ne relève-t-il pas d’une politique expansionniste avec l’ultime provocation des bases de l’Otan en Ukraine ? Ce grignotage territorial est à l’origine de cette folie militariste qui va engloutir des milliers de milliards de francs. Ces sommes vertigineuses, destinées à la destruction et à la mort, contribueront à dégrader encore plus notre environnement et manqueront à un combat beaucoup plus essentiel : la préservation de notre bien commun, la TERRE.

Daniel Fortis

1231 Conches                                                                                          Genève, le 17 mars 2023